La Sant Jordi (St Georges en français, San Jorge en espagnol) est une fête qui se déroule le 23 avril. La tradition veut que, chaque année, on offre une rose, et depuis 1920, un livre.
C’est devenu le Jour du Livre, bien sûr amplifié par ces spécialistes des ‘ponts’ que sont les ibériques, à la Semaine du Livre. Pour une fois nous n’allons pas nous plaindre de ces prolongations, tant la carence en matière de lecture est un mal endémique ici…
Coïncidence ou non, la Saint Georges est indissociable de l’image du livre puisque le 23 avril 1616 fut enterré à Madrid le célébrissime Miguel de Cerventès, l’auteur de Don Quijote. Autre coïncidence, c’est aussi le 23 avril, de la même année 1616 que mourut William Shakespeare à Stratford-upon-Avon. On ne peut pas rester indifférent à une telle conjonction de date!
Voici une image qui se veut humoristique (pas pour moi !) faisant l’apologie de la lecture ‘digitale’ et dénigrant le coût élevé des livres. Je ne sais pas si c’est un gag (je l’espère) mais avec les publicitaires on ne sait jamais jusqu’où peut aller la mauvaise foi.
14 produits que vous devez cesser d’acheter pour économiser. Acheter des livres est un hobby assez cher et souvent peu pratique. Au contraire un e-book permet de stocker plusieurs exemplaires en peu de place. De plus les bibliothèques offrent un catalogue très complet de volumes ‘digitaux’ pour lesquels il n’y a absolument rien à payer. Ça vaut la peine !
Juan Manuel de Prada, écrivain espagnol, donc passionné par les livres (Bonjour Monsieur de La Palisse !), réfractaire à tout progrès informatique, vient de publier un article plein d’humour grinçant au sujet du Jour du Livre. Je traduis quelques perles :
J’ignore quelles sont les raisons pour lesquelles le Ministère de la santé n’interdit pas la vente des livres qui distraient les gens de leurs dépendances à d’autres formes d’activités de loisir tellement plus gratifiantes comme les réseaux sociaux et la consommation boulimique de séries TV. A chaque printemps je suis horrifié de la prolifération monstrueuse de foires du livre qui infestent les jardins et places publiques de nos cités pour inciter des innocents qui n’ont jamais lu une ligne à se ruiner pour l’achat de littérature imprimée.
On devrait obliger les éditeurs – de la même manière qu’on l’a imposé aux fabricants de cigarettes – à apposer sur leurs couvertures des mises en garde sur les risques que la lecture pourrait engendrer : sécrétion de pensées originales, qui sait peut-être responsable de formation de tumeurs cérébrales ! En attendant des directives de l’Union Européenne sur le sujet il est urgent qu’à l’image des médicaments, les livres soient accompagnés d’une notice de mise en garde :
Composition : Ce livre est fait de pages écrites réunies en cahiers cousus dont la vision peut causer des vertiges et des baisses de tension.
Indications : Etant admis que l’usage d’un livre soit un signe de prestige et de niveau social, nous recommandons, pour ceux qui n’y sont pas préparés, que les bibliothèques domestiques soient strictement ornementales et qu’elles restent la meilleure cachette pour la poussière.
Posologie : En cas d’addiction aigüe à la lecture il est recommandé de ne pas dépasser la dose de trois ou quatre paragraphes par jour. Faire très attention au contenu des textes sur le revers des pages de couverture, les plus vicieux agents de propagande pouvant conduire à des pensées subversives.
Précautions : Il y a de fortes probabilités que la lecture soit une maladie contagieuse et héréditaire. Si vous êtes ‘enceinte’ abstenez vous de lire car votre fœtus pourrait naître avec des malformations. Si des connaissances souffrent de ce genre de vice, faites-les mettre en quarantaine avant qu’ils ne vous contaminent.
Effets secondaires : La lecture cause la méningite, des migraines, des nausées ‘sartriennes’, des pensées stéréotypées, delirium tremens et même le risque de prendre ses propres décisions, une fluidité dialectique, etc.
Intoxication et traitement : En cas de lecture à dose élevée le malade peut souffrir d’insomnies, d’excitabilité allant même jusqu’à faire de l’ironie et proférer des sarcasmes contre le régime politique en place. Dans ces cas graves le meilleur antidote est d’exposer le patient à des irradiations prolongées de rayons cathodiques, de préférence concours TV avec des ‘hominidés’ bas de gamme et des ‘hominidées’ à gros nichons (avec les excuses du traducteur !). On recommande aussi une thérapie d’immersion intensive dans Twitter et WhatsApp. En cas de malades incurables il ne reste que la diète substitutive avec des lectures de programmes électoraux.
Attention : Les livres ne doivent pas être laissés à portée des enfants.
NdT : Libre à vous de prendre le texte de Prada au premier degré !
Et pour terminer ce chapitre dans la bonne humeur, un dessin de mon ami Sansón que pour une fois je n’aurai pas besoin de traduire :
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