Mais que fait la police ?… Moi je vais vous le dire !

1961 

J’ai 20 ans et inaugure une fonction qui vient d’être créée, j’allais dire « sur mesure » pour moi! Secrétaire à la Direction de Police d’une ville de 20’000 habitants.

Curieux de tout, enthousiaste, organisé et intéressé par mon boulot, je m’intègre rapidement dans cette ‘organisation’ (un peu désorganisée du reste !) des forces de l’ordre. Ils avaient imaginé que mes diverses attributions seraient difficiles à assumer : Les agents de police qui rédigeaient leurs rapports en frappant à deux doigts sur leurs claviers pensaient que le secrétaire du commissariat aurait de la peine à s’en sortir sans faire des heures supplémentaires. Tu parles !  En quelques heures j’avais fini mon boulot de la journée, ce qui me laissait du temps pour aider mes collègues en uniforme peu à l’aise avec la rédaction et la dactylographie. J’étais chaque fois récompensé par une invitation à partager quelques élixirs au ‘bistro’ voisin. Il y a prescription et je peux avouer que je passais parfois plus de temps au bar qu’au bureau ! Mais mon travail était à jour et personne ne m’a jamais fait de griefs sur mes absences. Donc je sais de quoi je parle en soutenant les politiciens qui veulent réduire le nombre des fonctionnaires ! J’avais assez de temps libre pour participer, une fois par semaine, aux entraînements des policiers au stand de tir de la commune. images-3.jpegPassionné de tir sportif et bon tireur, j’avoue m’être régalé : J’ai ‘fait feu’ avec des armes de poing Mauser, Browning, Beretta, Luger, SIG Parabellum, des carabines, des ‘mousquetons’ 11 et 31, des fusils d’assaut Fass 57, la plupart de ces armes provenant de confiscations judiciaires. Quel pied !

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Je passais parfois mes soirées au poste de police. C’était sympa, il y avait toujours un verre à boire et ça me coûtait moins cher que de traîner en ville dans les estaminets ! Un soir nous avons dû interrompre notre partie de cartes et ranger les bouteilles (!) car les deux collègues de garde venaient d’être appelés pour une intervention sur les lieux d’un accident de la circulation. « Secrétaire ! Tu fais le planton en notre absence ? »

Et me voila promu Chef de poste…

Le téléphone sonne ! « Bonsoir, ici le Café du Commerce, les ‘vanniers’ se battent, envoyez-nous vite du monde !» Je précise que sur les rives lémaniques on nomme ‘vanniers’ (qui normalement fabriquent des paniers en osier) tous les marginaux qui ne sont pas fondus dans le moule de la normalité : ferrailleurs, romanichels, marginaux, tziganes, gens du voyage, ‘voleurs de poules’, forains, rémouleurs, j’en passe.

J’assume ma fonction de responsable du poste. Féru de technique je manipule facilement le standard téléphonique et prends l’initiative : Alarme du Groupe de réserve N° 1 (4 agents en principe !), 20 secondes d’attente, 2 présents ! Donc alarme du groupe N° 2 …

Je résume l’intervention de « mes deux escadrons » au ‘bistro’ en question : A peine la porte franchie, alors que deux groupes de dix « vanniers » en étaient venus aux mains, cassant tout, la police s’est trouvée en face d’un seul groupe ‘très homogène’ de 20 personnes… et pas des enfants de choeur ! Vous avez pigé la réconciliation subite des antagonistes ! « Essayez de vous calmer sans que nous devions vous envoyer la gendarmerie, cessez les hostilités et bonne fin de soirée, au revoir ! »

A leur retour ils m’ont dit que la prochaine fois il fallait laisser « ces gens » régler leurs différents mais j’ai évité la ‘dégradation’ pour ma décision un peu exagérée (comme disait Coluche, Unknown-1.jpegRobert y risque rien, il est même pas gradé !) couvert par ceux qui m’avaient confié, provisoirement mais un peu légèrement, la responsabilité du commissariat ! Dans le cadre de mes fonctions, j’en ai vu d’autres : j’étais en civil mais assermenté et titulaire d’une carte officielle de police. Parfois, en l’absence du Commissaire, je présidais à sa place la Commission des amendes. Vous savez, c’est la possibilité des verbalisés de venir s’expliquer de vive voix en comparution officielle. Et votre serviteur qui avait à peine 20 ans, imaginez la crise d’orgueil… décidant du maintien, de l’abaissement ou annulation des sanctions ! 

L’autre bon côté de mon job était le service officiel d’ambulances du district qui nous était attribué, les intervenants étant les agents de police. En cas d’appel ils posaient la veste gris-vert et leur arme de service pour revêtir une blouse blanche mais oubliant souvent d’enlever leur képi de flic !

Quelques nouveaux venaient d’être engagés, arrivant de leur campagne profonde, récents titulaires d’un permis de conduire mais sans aucune expérience n’ayant même pas de voiture personnelle. Vous me voyez venir, moi qui passais ma vie de jeune conducteur en tentant de juguler mes envies de conduite rapide. « Secrétaire ! Une intervention : le médecin a demandé l’envoi d’un conducteur qui va vite pour sauver une, peut-être deux vies. Tu prends le volant ! » J’enfile une blouse blanche et départ. Pin-pon pin-pon ! Bleu bleu bleu ! Je ne vous raconte pas le gymkhana pour remonter, en zigzaguant et en se faufilant, une double file de voitures, entrer dans Lausanne à 18:00 heures dans la circulation à plus de 100 km/heure ! Il s’agissait d’une parturiente faisant de l’albumine et c’était urgentissime. J’ai su, avec les félicitations du médecin chef de l’hôpital, que j’avais permis de sauver la mère et l’enfant.

Il y a des fois où on se sent moins inutile sur cette terre!

Je me dois de préciser que dans les années 60 on n’exigeait pas le permis professionnel pour conduire une ambulance, pas plus que des cours de samaritains ou de connaissances de premiers secours. Pour ceux qui ricaneraient je précise que toutes mes interventions ayant permis de sauver des vies étaient dues à mes facultés de pilote assez… téméraire et que je n’ai heureusement jamais eu à prodiguer les premiers soins aux blessés car les pauvres auraient vu leur cas s’aggraver…

ambulancesoinsintensifs.jpgC’était bien sûr avant l’invention qu’on doit aux médecins italiens dans les années 70, rendons leur hommage : Les Unités mobiles de soins intensifs!    Avant on ne demandait pas aux ambulanciers d’autres qualités que de savoir conduire vite. Maintenant avec les UMSI on se déplace rapidement sur le lieu de l’accident et là, en toute tranquillité, un médecin et ses aides maintiennent la vie (entubage, perfusions, transfusions, médicalisation) avant d’emmener le patient sans le secouer, à vitesse modérée vers l’hôpital.

Quelle satisfaction, à l’âge de la retraite, d’avoir eu une vie intense, originale, pleine de surprises et de satisfactions. 

 

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Mais ça aurait pu être encore plus ‘fun’ si j’avais persévéré dans la carrière para-policière. J’aurais pu m’engager comme pilote dans la Police italienne. Là bas ils ont des Lamborghini Gallardo de 500 CV et des Huracan de 600 CV. 

Un commentaire sur “Mais que fait la police ?… Moi je vais vous le dire !

  1. Si j’avais pu mettre un ❤️je l’aurai fais!! L’ambiance ne dois plus être la même dans les postes de police de nos jours…

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