J’ai traduit pour vous !

A plusieurs reprises, j’ai publié ici des traductions de textes d’Arturo Pérez Reverte, académicien de la Real Academia Española, romancier, et surtout éditorialiste pamphlétaire ! Je lui soumets toujours mes écrits et son assistante vient de valider une nouvelle traduction qui, j’espère, vous fera sourire… pour le moins.

Voici le mail que je viens de recevoir: “Por indicación del Sr. Pérez-Reverte le transmito la autorización para publicar en su blog la traducción al francés del artículo Me tenéis acorralado, cabrones, XLSemanal 27.10.2022, del que es autor don Arturo”.

Il s’agit d’un ‘coup de gueule’ paru dans XLSemanal, le supplément hebdomadaire de mon journal, et ceux qui connaissent mon aversion pour les téléphones portables, comprendront que je suis heureux de partager les idées et la verve d’un personnage ‘aussi haut en couleurs’ que lui !

Cornelia insiste pour que je prenne son ancien Nokia quand je m’aventure sur des chemins un peu… escarpés, en promenant Nico ! Elle a installé une carte à prépaiement, dont je ne connais même pas le numéro. Nous rechargeons (obligatoirement) une colossale somme de 5 euros (le minimum possible) chaque 6 mois, investissement perdu, puisque je n’utilise jamais cet appareil.

Place à Arturo Pérez Reverte, traduit par akimismo :

Vous m’avez coincé… bande de crapules !

(Titre original Me tenéis acorralado, cabrones)

En principe, je me retiens, mais il y a des limites, et elles sont franchies. Avec mon vieux téléphone portable Nokia dans la poche, qui me sert à… téléphoner (!), donc sans Internet, ni applications, ni whatsmachin, je n’ai besoin de rien transporter d’autre sur moi, même si ça contrarie mes amis connectés ! Hein… t’as pas WhatsApp ?

J’ai bien sûr un ordinateur, comme tout le monde, que je croyais suffire à mes nécessités, je dis bien ‘que je croyais’… naïf, car il semble qu’actuellement ce ne soit plus le cas, que le monde entier se soit ligué contre moi, m’obligeant à utiliser une de ces incongruités de smartphones. Pour me pourrir la vie, bande de crapules !  Je comprends que, pour leur travail, ou par goût personnel, certains aient besoin ou désirent avoir un mobile. C’est leur droit, chacun étant libre d’organiser sa vie comme il le veut… mais fichez la paix aux autres, et laissez-nous le choix de notre modus vivendi.

Oubliez les fallacieux prétextes utilisés par les banques, lignes aériennes, de toutes les corporations et négoces sans scrupules qui affirment que cette nouvelle technologie vous facilite la vie en abaissant les couts de leurs services. Tu parles ! Ils nous empêchent surtout de renoncer à ces, euh… facilités, nous qui n’avons rien demandé.

Personnellement, ce qui me faciliterait la vie, serait de recevoir du courrier, traditionnellement sur papier, permettant d’archiver les documents importants comme les quittances de l’électricité, de l’eau, des impôts et toutes les communications officielles, même … les amendes !

Je ne vois pas pourquoi je devrais passer une heure à déchiffrer si la télé consomme plus ou moins de courant que le lave-vaisselle, ni convertir une opération bancaire ou tout paiement de taxe municipale en un imbroglio compliqué plein de codes, de clés, de signatures électroniques et de confirmations d’identité. Tout ceci, bien entendu, à la condition qu’aucune interférence cybernétique ne te renvoie au point de départ…

L’immense problème actuel, dû à la main mise de la grande pute (Don Arturo dixit !) informatique, est que de moins en moins d’opérations peuvent s’imprimer. Essayez avec la carte d’embarquement pour prendre l’avion, l’entrée au cinéma, ou au musée, toutes manoeuvres impossibles sans un téléphone ‘intelligent’ avec des codes QR. De plus en plus d’opérations impossibles à réaliser avec un document imprimé ! Je l’ai vécu au cinéma l’autre jour, avec les billets d’une compagnie aérienne et la réservation d’un hôtel.

Un téléphone dit intelligent de la dernière génération s’avère un outil indispensable, aussi pour ceux qui n’en veulent pas ou qui ne savent pas l’utiliser, sans parler ceux qui n’en possèdent pas !

Si vous voulez voyager, gérer quelque chose, bref… vivre, vous êtes condamné à toutes sortes de saletés d’applications, à vous immerger dans ce stupide monde virtuel de messages, clés, mots de passe et dépendance. Bien sûr que les gamins, que nous avons éduqués dans la suicidaire négation du désastre, semblent nés déjà dressés. Tant mieux pour eux mais… que se passe-t-il pour les aînés ? Quid de ceux qui ne peuvent pas, ou ne désirent pas s’adapter à cette forme de vie ?

Les solutions qu’on nous propose donnent la chair de poule, du genre cours pour le troisième âge qui devraient permettre, à nous les ‘vioques’, de nous adapter. Pour que les octogénaires qui n’ont pas de neveux, fils ou petits fils, apprennent à décharger les indispensables applications pour supporter ce qui leur reste d’espérance de vie, l’oeil et l’oreille vissés à leur mobile !

Y en a marre, et je vous laisse continuer à brouter avec le troupeau, étant entendu que la comédie et les contraintes sont irréversibles et que nous sommes condamnés à les subir, en bouffant tous dans la même auge.

Ma seule consolation est de disposer de cette page hebdomadaire pour me défouler, parfois en distillant mon fiel. (Note du traducteur : Et moi aussi j’en profite, en vous lisant. Merci Don Arturo !).

Je peux ainsi vouer le système aux gémonies et vomir sur ceux qui me poussent, comme le reste du bétail soumis, dans ce cul de sac… sans issue, comme son nom l’indique !

Reste-t-il une alternative pour ne pas rejoindre ceux qui trouvent normale l’aide de leur smart au moment d’embarquer dans un avion, de régler à distance la température de leur logement, et même de lire le code QR des menus au restaurant ? Ceux qui souffrent d’une dépendance maladive à leur stupide accessoire ? Ceux qui sont désespérés quand ils perdent leur missel moderne, quand on le leur vole ou qu’une chute sur le sol le met en pièces détachées ? Ceux qui pleurent la perte de leurs photos de famille et des applications qui leur permettent de survivre dans le monde hyper-connecté actuel ?

Sans parler de ceux qui hurlent leur désespoir parce qu’on on les a ‘hackés’ depuis Singapour, la Patagonie ou plus certainement depuis le Niger.

Être âgé et ‘amorti’ me permet de rêver, je le jure sur le Sceptre d’Ottokar, d’un iceberg géant, plus grand que celui qui coulé le Titanic, d’une monstrueuse tornade ou explosion solaire, d’une extinction planétaire totale… qui enverrait tous les smart phones et leurs applications se faire foutre (NdT Désolé pour les prudes oreilles de mes lectrices mais c’est la traduction du mot ‘puñetas’ utilisé par M. Reverte) et laisser l’humanité se regarder sans savoir que faire ni comment le faire.

Et moi, bien évidemment, j’irai avec vous tous… manquerait plus que ça, mais vous me reconnaîtrez dans le troupeau puisque je serai le seul à m’esclaffer, hilare comme Samson devant les Philistins, alors qu’utilisant sa force magique, il avait provoqué l’écroulement du temple sur les tyrans et sur tout le peuple qui s’y trouvait.

(Dernière note du traducteur : « Don Arturo… me permettrez-vous de vous accompagner dans ce fou rire ? »

Un autre Clin d’œil

Sous-titre : J’ai lu pour vous !

Felipe González

On ne parle pas de politique, ni sur ce blog, ni avec les autochtones, ce qui est normal de la part d’un anarchiste (Ouh le gros mot !) qui n’est jamais allé voter, même dans son pays natal… ce qui ne m’empêchera pas de citer une remarque d’un homme politique, ancien chef socialiste du gouvernement espagnol qui se nomme Felipe González, né en 1942, donc à un an près nous aurions pu être de la classe… sans pourtant que je partage ses idées !

Qui est ce monsieur González ? Qu’est-ce que le PSOE ? Comment fonctionne l’Espagne ? Quelle fût son passé ?

C’est vrai que mon propos nécessite un court et rapide coup d’œil résumant les dernières 50 dernières années en Espagne, dont acte :

Je ne vais pas vous apprendre que dès 1936 il y a eu une terrible guerre civile fratricide et mortifère, suivie de 40 ans de dictature ‘musclée’ du général Francisco Franco, mort en 1975. Avant de disparaître, il a rétabli une monarchie constitutionnelle, en nommant le roi Juan Carlos 1er qui, avant de faire le ‘con’ en ‘couchant’ à droite et à gauche, magouillant avec l’argent de certains émirs et… tuant les éléphants, avait parfaitement réussi ce qu’on nomme ici « la transition », joli mot pour qualifier le passage d’une dictature pure et dure à une démocratie…

Vous en saurez plus sur les honteux agissements de l’ex monarque en relisant ma publication sur ce blog, sous le titre Le roi des khons !

https://wordpress.com/post/akimismo.wordpress.com/4494

Quelques repères historiques :

En 1976, le premier gouvernement démocratique de droite modérée était présidé par un homme qui a laissé de bons souvenirs, Adolfo Suárez, de l’UCD (Union démocratique du centre) un parti qui se proclamait d’ouverture (partido de apertura).

On retiendra qu’il a fait voter la légalisation des syndicats, des partis… même du PCE (Parti communiste espagnol). Il est aussi à l’origine de l’amnistie, paraît-il générale (sic) des prisonniers politiques, permettant le retour au pays des exilés idéologiques.

C’est sous la présidence d’Adolfo Suárez qu’a eu lieu la première assemblée légale d’un parti de gauche, le PSOE (Partido socialista obrero español).

Les idées de changement germaient et nous avons eu un gouvernement socialiste en 1982, ce qui devait déboucher sur l’alternance gauche droite que nous connaissons encore de nos jours !

Le chef de ce gouvernement était… Felipe González, dont je vous parlais plus haut.

Et alors ?

Alors, je viens de lire un intéressant reportage sur mon presque contemporain.

A la question qui n’a rien de politique : L’Espagne se vide-t-elle de ses populations rurales, l’ancien chef du gouvernement répond :

C’est une des grandes tragédies actuelles, avec des conséquences dramatiques sur la vie des ruraux qui restent. Imaginez qu’on convoque des octogénaires par SMS pour se faire vacciner, certains vivant dans des campagnes sans couverture téléphonique mobile et ne sachant même pas ce qu’est un ‘Short Message System’.

Nous devrions respecter le choix de ceux qui ont décidé de rester (où n’ont pas pu faire autrement) dans leurs villages et leurs fermes de toute la vie. Même si leur choix nous paraît obsolète !

Il conclut par cette phrase qui a justifié ce ‘clin d’œil’ :

C’est la première fois dans l’histoire de l’humanité que ce sont les jeunes qui enseignent aux anciens !

C’est tout. Bonne réflexion à vous !

Déjà paru sous le titre Clin d’œil

                  Le café en Ukraine              22 avril 2022

Pénultième publication (44) de Ma vie en monovision

Hé hé… on s’approche du but, mais nous n’allions pas nous quitter sans un clin d’œil, fut-il amblyope !

Il y a quelques semaines, rentrant d’une promenade sur le sable de l’Atlantique, j’observe un couple d’allemands, lui 66 ans, c’est ce qu’il m’a dit, jouant au frisbee sur la plage.

Leurs échanges intéressent mon chien et je saisis ce prétexte de réaction canine pour poser quelques questions.

Parfois on apprécie de parler la langue de nos interlocuteurs… Il me dit avoir abandonné le tennis, souffrant d’un gros problème à un œil. Bienvenue au club !

Pour entretenir ses réflexes, il a trouvé que le frisbee était plus facile à maîtriser, grâce à la lenteur des échanges, la couleur fluo et la dimension de l’objet volant !

Pour ceux qui ont des problèmes visuels avec les sports d’échange de balles ou autres projectiles, je retiens la leçon du ‘frisbiste des sables‘, et je propose quelques améliorations sportives originales :

Pourquoi ne pas jouer au football avec des ‘Medicine balls’ pesant entre 6 et 10 kilos, ce qui inciterait les ‘footeux’ à couper leurs ridicules chignons ou dreadlocks et raser leurs sculptures capillaires, pour passer à un ‘look’ d’hommes, pas de ‘gonzesses pleurnicheuses’ qui se roulent par terre au moindre contact. Et moi de me réjouir de les voir intercepter les balles avec leur tête…

Que penseriez-vous de pratiquer le tennis avec des ballons de rugby ? Les spectateurs (et les arbitres !) pourraient enfin suivre la trajectoire actuellement trop rapide et les traces d’impact des balles au sol. Et l’industrie phamarcochimique pourrait élaborer des produits bien plus puissants que ceux que prennent les ‘djokomachins’ et autres millionnaires de la ‘baballe’ (maintenant je crois qu’on dit booster non ?)

Et le golf avec des boules de pétanque ? Il suffirait de renforcer les clubs et surdoser les bêtas bloquants qui aident les joueurs à se concentrer. On pourrait surtout diminuer la surface des peu écologiques terrains, honteusement gourmands en eau d’arrosage surtout au Sud.

Une autre idée : le badminton avec remplacement du traditionnel volant par des boules de neige, afin que les pays nordiques puissent aussi participer en hiver.

Enfin, j’invente le curling joué avec des pierres d’Unspunnen. Je vous dois une explication :

La Pierre d’Unspunnen pèse 83,5 kg et fait l’objet depuis 1805 d’une compétition de lancer lors d’une fête, à Interlaken. Le but de la compétition est évidemment de lancer la pierre le plus loin possible. Le record officiel est de 4 mètres 11 cm !

Bon… assez ‘déconné’… et place à une page genre album photos qui précédera la conclusion de Ma vie en monovision, d’imminente publication !

Le kaléidoscope de ma vie en guise de ‘clap’ de fin ! Certaines photos ont déjà été publiées dans ce blog !

369 km en 12 Heures, une péripétie car si je n’ai qu’un oeil, j’avais deux bonnes jambes !
Graham Hill remporte le GP de Monaco 1964. Publiée dans l’Année Automobile, c’est la première photo professionnelle prise par votre serviteur, au bon endroit avec son Canon. Les autres photographes, les mécaniciens et le populaire monégasque Louis Chiron accourent !
Patente vaudoise de « Maître de ski », tu parles d’un titre !

Pendant sept ans, speaker du Tour de Romandie cycliste, d’un Championnat du monde de triathlon, de multiples championnats de vélo et de ski et même l’animation d’un championnat suisse des garçons de café à Lausanne, avec 20’000 auditeurs potentiels ! Le tout simultanément dans trois de nos langues nationales (français, allemand, italien) plus l’anglais. J’ai depuis ajouté l’espagnol mais je ne « cause plus dans le poste! » Ah! J’oubliais: j’ai fait des animations pour noces, banquets, bastringues diverses et parfois, même, payé de ma personne sur les pistes de danse!

Le début d’une carrière avec ma première carte de presse. J’avais 18 ans

Qui d’autre qu’un borgne ‘touche à tout’ pourrait revendiquer d’avoir été spécialiste de la préservation du bois, titulaire d’une carte de presse, d’un brevet fédéral de professeur de ski… même pilote de ballon et de dirigeable?

Ma licence française de pilote de ballon. Les Suisses, comme Abraracoursix le chef Gaulois, avaient trop peur que mon aérostat leur tombe sur la tête !
Oui, j’ai passé mon IS (Brevet d’Instructeur de ski)

Ma vie en monovision (Chap. 42) Arrête ton cinéma (1) !

(Au fait, comment qualifie-t-on un texte précédent l’antépénultième ?)

Film Le Mans et péripéties aériennes 

Ceux qui pensaient à « Le Mans 66 », que je n’ai pas vu, ont ‘tout faux’ ! Il s’agit bien sûr du film « Le Mans » de 1971, avec Steve McQueen, à qui j’emprunte cette maxime :

“Racing is life. Anything before or after is just waiting”

Un sacré personnage, que j’ai côtoyé avec un grand bonheur.

Photo Norbert Duvoisin

Le réalisateur Lee H. Katzin venait de remplacer John Sturges qui avait abandonné le projet. Problèmes financiers, veto des assurance et surtout… d’égo !

On m’avait présenté D.B. Tubbs, l’attaché de presse du film, avant le début du tournage.

Le courant a passé et il m’a demandé de l’aider à « faire parler du film » en cours de réalisation, dans les revues spécialisées, mon domaine…

Ce sera le début d’une collaboration de plusieurs mois. Je me rendais au Mans une fois par semaine, souvent en avion privé de la production du film, un Cessna bimoteur de 8 places de Touraine Air Transport, qui venait me chercher à Orly ou à Genève, selon les opportunités laissées par ses vacations pour le film. Si je restais deux jours, McQueen me laissait une des Porsche mises à sa disposition par l’usine de Zuffenhausen. 

J’envoyais des reportages à Sport Auto, l’Auto-Journal en France, Motor Sport en Allemagne, Quattroruote en Italie, Car Magazine en Angleterre et Motor Trend aux States avec des anecdotes du tournage.

Dans le prochain chapitre je vous parlerai des effets spéciaux à l’ancienne… et à l’américaine qui, comparés aux moyens électro technico informatiques modernes, paraissent moyenâgeux, mais ça avait de la gueule et sentait bon le réel !

Pour l’heure, je vous raconte une expérience aéronautique un peu ‘limite’ vécue lors d’une de mes visites dans la Sarthe :

Nous décollons d’Orly avec des VIP américains, invités de la production du film. Il est passé 17 heures et les prévisions météo ne sont pas bonnes. A peine en l’air, un mur de nuages orageux se dresse devant nous. « On y va !» me dit le pilote, un ancien de la guerre de Corée. Je précise qu’il avait l’habitude de m’installer sur le siège de droite. Nous n’en avons jamais parlé mais je subodore que ma présence à l’avant devait dissuader les passagers de poser des questions sur la présence, ou non, d’un vrai co-pilote ! Revenons aux nuages : En plein dedans. L’avion tremble et nous sommes comme dans une essoreuse.

On essaie par en-dessus… on essaie par en-dessous ! Idem. La plaisanterie dure 40 minutes, avant que nous posions sous la pluie battante à Toussus-le-Noble… à 9 km d’Orly.

Chacun sait que l’avion est un moyen de déplacement rapide : 40 minutes pour 9 km, c’est pas mal non ?

La production était venue récupérer les VIP en limousine confortable, et les conditions s’améliorant, le pilote me dit qu’on va décoller, mais qu’il y a un ‘hic’ : Si nous dépassons le « crépuscule légal », pas le droit de poser au Mans, non équipé pour le vol aux instruments et nous devrons atterrir autre part.

Peu avant Tours, échange radio avec la direction régionale :

« Demande autorisation atterrissage Le Mans ! » « NEGATIF ! Le Mans non équipé IFR !» « Pas compris, répétez !»  Là je m’étonne car le message est clair ! « Le Mans NEGATIF !» Mon pilote prend une drôle de voix hachée, le coude sur la bouche et le micro très éloigné « … ompris… le mans affirmatif » Il ajoute quelques borborygmes inaudibles puis coupe la radio ! Il me fait un grand sourire augmenté d’un clin d’œil appuyé, change de canal et, en CB avec un pote du Mans, il ‘commande’ l’illumination de la piste. C’est ainsi que nous avons atterri en pleine nuit, discrètement sur une piste éclairée par les phares de 4 voitures convoquées anonymement. On n’oublie pas une aventure pareille !

Tiens, vous savez bien sûr qu’en aviation, on utilisait ‘négatif’ et ‘affirmatif’ dans les vacations radio ? Sauf que le contraire de Négatif est devenu Affirm  car la confusion entre affirmatif et négatif a coûté la vie à 583 personnes le 27 mars 1977 à Tenerife. Les anciens se souviennent de la collision frontale entre deux Boeing 747 Jumbo, l’un en train de décoller, l’autre en procédure finale d’atterrissage. Oui… 583 morts pour une similitude du phonème  ATIF’ pour deux ordres contraires.

A l’un des avions on a dit affirmatif pour la pose et à l’autre négatif pour le décollage. Nous avons vu le résultat !

La suite de ce texte sera moins tragique et évoquera les trucages de grand papa pour le film Le Mans ! Et ce sera l’antépénultième chapitre de

Ma vie en monovision !

Ma vie en ‘monovision’ (Chapitre 39) A perte de vue…

Et si je perdais mon œil valide ?

Aucun borgne n’échappe à cette terrifiante pensée, surtout au moment de confier son bon œil à un ophtalmo pour l’opération de la cataracte ou pire, comme il y a 2 ans, alors que, comme Abraracourcix, j’ai cru que le ciel m’était tombé sur la tête : Je lisais tranquillement mon journal, et d’un coup la page s’est troublée, puis a disparu de ma vue. Par chance mon ophtalmo m’a donné rendez-vous en urgence le soir même à 20 heures. C’est à Ubeda, à 100 km de chez nous et je me félicite d’avoir insisté il y a quelques années pour que ma femme passe son permis de conduire.

Diagnostique : Décollement de la rétine. Ah bon ! Et comment ça se soigne ? Opération ! Quand ? Demain à 12 heures 30, le rendez-vous est déjà pris dans une clinique privée ! Où ? Cordoba ! Hein ?… Oui, Cordoba. On ne peut pas attendre un peu ? Non, car votre œil serait perdu.  J’abrège : Ma courageuse femme affronte, seule au volant bien sûr, un périple de 700 km. De la maison à Ubeda, puis retour pour prendre une brosse à dents et quelques affaires et, dès 6 heures, les 250 km depuis notre domicile jusqu’à Cordoba. Et retour au bercail avec l’handicapé, après l’opération ! Je ne le répéterai jamais assez : Merci chérie !

Voici à quoi ressemble un décollement de la rétine :

La ligne arrondie du bas est le fond de l’oeil

Et voici ma rétine recollée !

La ligne du bas, c’est toujours le fond de l’oeil… souligné en rouge par le praticien!

L’opération a duré une heure quarante. Vous voulez des détails ?

On fait trois trous dans la cornée : un pour passer l’outillage destiné à remettre les éléments déchirés en place, un autre orifice pour le laser destiné à appliquer les 700 points de soudure (oui 700 !) et fixer la rétine rassemblée et recollée. Le troisième trou permet de passer un tuyau pour évacuer le ‘vitré’, ce gel qui remplit le globe oculaire et un autre pour injecter du gaz qui maintiendra sa forme sphérique.

Il faudra attendre l’élimination naturelle de ce gaz et son remplacement par un nouveau ‘vitré’, que cette merveille de corps humain aura fabriqué.

Une ‘plaisanterie’ qui ne me laissera voir que des lueurs, de vagues formes et des silhouettes en mouvement, sur une chaise longue, pendant 5 semaines. Ayant vécu cette longue attente sur ma terrasse je suis heureux de vivre au climat andalou.

Une image à laquelle je suis attaché, puisque que j’en suis l’auteur… mais surtout parce que j’ai bien failli ne plus jamais la voir !

Après cet intermède moralement ‘douloureux’, j’ai repris ma vie presque normale, 3 mois plus tard !

Pour l’instant, je suis reconnaissant que l’ophtalmologie me permettre de continuer la publication de ‘Ma vie en monovision’.

Vous me suivez ?

Les borgnes maîtrisent mieux les risques !

J’ai pris des risques dans ma vie : en montagne avec quelques situations extrêmes à près de 8’000 mètres en Himalaya, moins 38° en Laponie, cyclisme avec des descentes de col à plus de 100 km/h, moto à 285 km/h, plus de 300 km/h avec une Ferrari Daytona de compétition de 440 CV, parapente, ballon à air chaud, dirigeable, entretien de toits à plusieurs dizaines de mètres de hauteur, et même deux mariages… je vous l’ai dit, j’ai vécu dangereusement ! Et je continue à prendre des risques : sachant que le 95% des gens meurent dans leur lit, je persiste à me coucher dans le mien chaque soir. J’ai connu des gens jouissant d’une vision normale qui ont eu des accidents, même graves et mortels. Ai-je eu de la chance ? Je réponds oui, mais seulement si la concentration permanente et la conscience du danger de tous les instants, qui m’ont permis d’échapper au pire, sont des caractéristiques de la chance !

Vivre avec un borgne 

Une porte d’armoire restée ouverte, c’est pour ‘ma pomme’, ou pour mon oeil, le valide bien sûr ! Un tiroir resté ouvert, c’est pour mon genou. Un tapis dont les coins se relèvent, c’est encore pour mon pied qui va trébucher. Idem pour tout meuble ou accessoire ménager non remis dans « son » site habituel. Ô que j’apprécie cette ancienne affiche de ma jeunesse, vue dans l’atelier d’amis artisans :

Une place pour chaque chose, chaque chose à sa place.

Quelques dizaines de centimètres de déplacement d’un objet par rapport à « sa » place habituelle peut être dangereux.  Je vous le dis : pour un amblyope et ceux ou celles qui le côtoient, c’est le Bronx ! L’occasion de remercier celles qui ont partagé ma vie pour leur compréhension…