Quelques réflexions linguistiques (Interlude N° 9)

Je vous ai dit l’autre jour qu’en vue de nos prochaines vacances au bord de l’Atlantique (Oh ! calmos, je n’ai pas dit La Baltique !) j’allais accélérer le rythme de mes parutions. Souffrez que je vous importune plus souvent, mais ‘bonne lecture’ tout de même !

Après le français (Interlude 7) …

https://wordpress.com/post/akimismo.wordpress.com/6219

… et langlais (Interlude 8)

https://wordpress.com/post/akimismo.wordpress.com/6251

…si nous parlions de l’espagnol dans le monde ?

Pour la petite histoire, 538 millions d’hispanophones occupent la 4ème place mondiale, derrière l’anglais, le chinois mandarin et l’hindi.

On évoquera aussi l’italien mais… je ne parlerai pas du russe. Non mais !

Quelques réflexions empruntées à Carmen Posadas, une écrivaine espagnole que je lis depuis longtemps, qui elle-même les a empruntées au Queen Sofia Spanish Institute… avec mes ajouts personnels.

Les termes ibériques ayant rejoint l’anglais américain (et bien d’autres langues), viennent des conquêtes espagnoles en Amérique du Sud au XVième siècle, c’est avéré :

Patio, du latin « pactum » en passant par l’occitan «pàtu».

ranch, de rancho

fiesta… qui figure dans le dictionnaire américain depuis plus de 300 ans

hurricane de huracán

tornado (je vous fais un dessin?)

Et le barbecue ?   Là, les hostilités vont commencer, car les espagnols disent qu’ils ont inventé le mot ‘barbacoa’, qui serait issu de barba (barbe) et ‘coa’ (diminutif de cola, queue). De la barbe à la queue évoquerait la manière d’embrocher un animal en le traversant de part en part. Mais c’est faux ! Si barbecue vient bien du continent américain, ce n’est pas des États Unis, mais de l’Amérique du Sud. Et il est aussi avéré que le mot ‘barbaque’ n’a rien à voir avec ce sujet. Histoire à suivre…

Alligator, qui n’est autre qu’une déformation du mot lézard espagnol (el lagarto), plaza, latino, burro, macho, tapas… oups, j’allais oublier ‘olé’ qui a depuis longtemps été intégré aux dictionnaires américains et français !

On n’oubliera pas la guérilla, pur produit de l’invasion napoléonienne de la péninsule ibérique en 1808.  Bien que l’actualité nous rappelle tous les jours ce ‘perpetuum mobile’, les enfants doivent savoir que l’envahisseur Napoléon n’était pas un tsar russe !

J’ai failli escamoter l’indispensable et réconfortante ‘siesta’ et que pensez-vous de quixotic, la version américaine de quichotesque ou quijotesque ?

Au passage, Carmen Posadas attribue à l’espagnol le terme cafétéria, alors que je pensais à une origine italienne, mais ‘la mère Gogol’ la situe à Istanbul en 1550 déjà ! Comme quoi…

Et la migration du français ? Toute une histoire, tant notre langue fut celle des nobles, des lettrés, de la royauté, bref des gens aisés, mais vous pouvez continuer à lire akimismo, preuve vivante quon peut essayer d’écrire… sans avoir une thune !

Les nantis ont exporté les termes de la gastronomie française qu’ils pouvaient se payer : baguette, mode du chef, amuse-bouche, hors d’oeuvre, crème brûlée, eau de vie (héhé!), beurre maître d’hôtel, entrecôte (mais sans le ‘^’), croissant, soufflé, sauce café de Paris. Ce sont aussi ceux « qui avaient les moyens » qui ont popularisé à l’étranger certains termes qui échappent à ceux qui ne sont pas nés avec une petite cuillère en argent dans la bouche, comme joie de vivre, bon vivant, lèche-vitrine, chic, connaisseur, parfum, boutique, tartufe, laisser faire, élite, naïf.

Et les italiens, dont nous avons parlé plus haut avec cafétéria ? Grands voyageurs, entrepreneurs, cinéastes et surtout musiciens, il est normal que leur langue ait engendré des expressions connues partout : dolce vita, allegro, vivace, sfumato, adagio, arabesco, ma non troppo, ristretto, tiramisù, parmigiano.  Vous noterez que par pudeur, je n’ai pas ajouté mafia !

Non, non je n’oublie pas les anglais, inventeurs de presque tous les sports, qui ont ‘envahi’ le monde avec, en premier lieu, le football et ses règles dérivées, ‘francisées’ grâce aux équipiers de Juste Fontaine, champions du monde en 1958 avec les bleus et aussi à la télévision d’époque avec Léon Zitrone : hands, corner, lines man, goal, off side, penalty, sont devenus faute de main, coup de coin, juge de ligne, but, hors-jeu ou coup de réparation, pour ne pas parler des tirs au but !

Je pensais conclure cette compilation par l’informatique. Mais vous y êtes tous confrontés dans votre vie courante, votre boulot et vos loisirs non ? Alors, mieux vaut mettre mon personal computer (PC) en stand-by plutôt que de continuer à ‘downloader’, faire du re-writing avec des datas stored dans mon hard disc.

Adios & Bye bye…

Oh, j’allais oublier : Ciao & Salut ! 

Une histoire de ‘vin aigre’… mais plus ‘aigre’ que ‘vin’!

Avant de partir nous réchauffer près de la Méditerranée  voici un petit texte qui rejoindra ma page: La rubrique ‘ethno’

Nous venions d’arriver en Andalousie, dans un hameau de la « Contraviesa Granadina »

Tout en haut de la liste de nos préoccupations pour survire dans ce pays, qui n’était alors pour nous qu’une contrée du ‘tiers monde’, il y avait bien sûr la recherche d’un point de ravitaillement en ‘vino tinto’ ! Et ça vous étonne ? Et si je vous dis que nous vivons dans cette partie de l’Espagne depuis 25 ans… ça vous étonne aussi non ?

C’est au moins la preuve que nous avons une certaine prédisposition à l’acclimatation. Aidés que nous fûmes par la gentillesse des natifs et leur sens de l’hospitalité, nous avons fini par mieux les connaître. Et eux aussi ont appris une certaine manière de voir les choses propres à notre culture du Nord. C’est ça l’échange, la découverte des autres (dans les deux sens !) et la convivialité. (Le premier qui parle de communautarisme… je lui botte le cul !)

Voici l’histoire :

On nous donne une adresse dans une bourgade en bord de mer, où on vend du vin de la région. Que je vous dise tout de suite qu’il s’agit de ‘Vino costa’, un vin du terroir ni rouge, ni blanc… mais une sorte de rosé ‘fourre tout’ qui ne mériterait même pas la qualification de vin en d’autres lieux ! Mais vous connaissez l’adage : Faute de grives…

Le vernaculaire nous emmène dans sa cave. Il ouvre ‘una garafa’ de 10 litres, remplit trois verres, deux pour nous et un pour lui. Nous trempons les lèvres sans conviction, goûtons avec un peu moins de méfiance et finissons par trouver le liquide ‘comestible’… sans plus !

Le vigneron ‘recape’ nos verres mais ne se ressert pas, justifiant cette abstinence ponctuelle par une prescription ‘matrimoniale’ à savoir que sa femme lui interdit de déguster plus d’un verre par visite de sa cave…

Retour dans notre village d’altitude avec ‘una garafa’ et dégustation en famille. Pouah !

Du vinaigre pur… je pèse mes mots.

Retour chez le producteur avec un ami du village, bon connaisseur des usages de la région.

Peu habitué à des retours de marchandise le vigneron, la mine un peu crispée, nous reçoit avec ses deux beaux-fils. Nous sommes donc 5 à attendre l’ouverture de notre ‘garafa’. Dégustation !

Le patron commence, boit une gorgée, fait une moue imprécise quant au ressenti à l’ingestion du liquide. Puis les deux beau-fils : même expression vide, échappant à toute obligation de qualifier breuvage.

Vient mon tour. Je suis mauvais acteur et incapable de dissimuler ma réaction à l’ingestion de ce vinaigre. Pouah ! Imbuvable.

Toujours entouré de visages impassibles, je demande à mon ami du village de s’y coller. Il boit son verre d’un trait. Aucune réaction en faveur ou en défaveur, mais un commentaire édifiant : « Bon, ce n’est pas ce que j’ai bu de meilleur mais tu sais… ici nous sommes habitués à boire bien pire ! »

A la fin de la séance d’appréciation du liquide le vigneron est bien obligé de se justifier. Tenez-vous bien, vous allez encore me traiter d’affabulateur mais jure que son propos est authentique :

« C’est vrai que j’avais constaté que le vin d’une ‘garafa’ n’avait pas très bon goût mais, afin de ne pas perdre les 10 litres (personnellement je continue à parler de vinaigre !) j’ai réparti le contenu en l’ajoutant, en petites doses, dans les autres récipients de ma cave ! »

L’imbécile (y a-t-il un autre mot ?) avait mis du vin vinaigré dans les autres récipients, contenant du vin jusque là probablement buvable. Résultat : Un stock complétement contaminé à l’acide acétique…

Vous étonnerais-je en disant que j’ai refusé qu’il me remplace la carafe, préférant récupérer mon premier (et dernier !) investissement dans « cette viticulture de très haute réputation».

Allez, j’élimine le mauvais goût que l’évocation de cette ancienne histoire provoque virtuellement dans ma bouche, en me rinçant les papilles avec une bouteille d’un excellent Albariño, un blanc des Baixas Bajas de Galicia !